
Au Mont Alvernia, le point le plus élevé des Bahamas (100 mètres!), le père Jérôme construit de ses mains dans les années 40 un extraordinaire et minuscule monastère , l'Ermitage, où il finira ses jours 18 ans plus tard cloîtré et contemplatif. Le site est à couper le souffle avec vue sur l'Océan des deux côtés de l'île. Mais c'est la bâtisse elle-même, que l'on atteint après avoir grimpé un chemin de croix à flanc de montagne, qui éblouit par ses proportions, son agencement, et son esthétique. Car le père Jérôme, pasteur protestant converti au catholicisme, était aussi un grand architecte, qui a construit ou restauré des dizaines d'églises aux Bahamas, les plus connues à Long Island, dans un style éclectique, fusion du roman, du celtique, et du cycladique. Une vie extraordinaire: bourlingueur des mers, coureur des bois au Canada, prêtre itinérant dans l'arrière pays en Australie, architecte aux Bahamas, John Hawes était un Anglais issu d'une famille aisée, qui a choisi, plutôt que le confort bourgeois, à la fois l'aventure et le dénuement, inspiré par Saint François d'Assise...
Cat Island, la cinquième des Bahamas en superficie, et la terre natale de Sydney Poitier, est peut-être la plus authentique des îles que nous ayions visitées. Ici, peu ou prou de développement immobilier, des petits villages à moitié abandonnés, des kilomètres et des kilomètres où il n'y a pas âme qui vive, des plages à couper le souffle, et un rythme de vie encore plus alangui qu'ailleurs. Les locaux avec qui nous avons conversé ont semblé surpris que nous aimions leur île, où il ne se passe rien. Pourtant, au XIX eme siècle, Cat Island était prospère, exportant sisal, ananas, et coton vers l'Europe; un chemin de fer a même été construit, le seul des Bahamas, dont des vestiges subsistent. Mais toute cette activité s'est estompée, et on ne voit plus maintenant que les ruines éparpillées dans le 'bush' des minuscules maisonnettes d'esclaves des domaines agricoles. Cat Island se meurt, et les jeunes quittent pour Nassau ou les États-Unis, comme c'est le cas pour plusieurs des 'Far Islands' des Bahamas, malgré les promesses jamais tenues des politiciens et bureaucrates de favoriser le développement économique de l'île. Mais les résidents de l'île veulent-ils vraiment que leur paradis devienne un autre Paradise Island?