samedi 14 avril 2012

Sayonara


l'horizon pâlit,
le crépuscule, puis
la nuit;
la voile, affalée,
gît.

dimanche 8 avril 2012

cloître médiéval aux Bahamas


Sur le chemin du retour vers la Floride, nous retraversons le port de Nassau, niché entre les îles de Providence et Paradise Island, passage obligé pour sortir du banc des Bahamas, comme le sont le détroit de Gibraltar ou les Dardanelles en Méditerranée, et le Chatt el Arab au golfe Persique. La ville de Nassau n'est pas, peu s'en faut, une destination particulièrement plaisante, malgré de pittoresques étals de poisson, et son Parlement rose bonbon. Le port est très animé, Nassau étant la plaque tournante de l'approvionnement de l'archipel bahamien, et les 'mailboats', chalutiers et bateaux de pêche se partagent l'étroit chenal avec les plaisanciers. D'immenses paquebots venus de Floride déchargent leur cargaison de touristes ébahis qui congestionnent le centre ville truffé de boutiques supposément pittoresques qui sont autant de trappes à touristes, comme le sont d'ailleurs les policiers déguisés en bobbies coloniaux. Pathétique spectacle que celui du tourisme de masse (qui rappelle ces visions apocalyptiques de navires de croisière, ancrés au large de plages idylliques à Eleuthera et Little San Salvador, où les milliers de passagers de ces hôtels flottants font une escale d'une journée pour pratiquer les 'sports nautiques' et se dorer au soleil). Nous choisissons un bar pour déguster avec les locaux une bière Kalik et une salade de concques le long des quais; peu de touristes s'y aventurent, et l'atmosphère bon enfant est sympathique malgré tout: une capsule pour notre boîte à souvenirs. Nous faisons contre mauvaise fortune bon coeur en décidant de traverser à Paradise Island pour revoir l'aquarium de l'Atlantis, mais on a décidé depuis notre dernière visite il y a deux ans d'en restreindre l'accès aux résidents de l'Hôtel, donc nous rebroussons chemin et décidons de visiter 'les jardins de Versailles' et le cloître médiéval 'importé' de France au début du XXeme siècle par un milliardaire américain. Surprise, le charme de l'endroit nous enchante, et malgré le côté incongru de l'insertion d'une ruine européenne du treizième siécle dans les Caraibes, la sérénité que dégage l'esthétique monacale est indicible, et les jardins à la française qui l'enchâssent sont très beaux. Une autre capsule en cette fin de croisière...

dimanche 1 avril 2012

Cat Island, Bahamas




Au Mont Alvernia, le point le plus élevé des Bahamas (100 mètres!), le père Jérôme construit de ses mains dans les années 40 un extraordinaire et minuscule monastère , l'Ermitage, où il finira ses jours 18 ans plus tard cloîtré et contemplatif. Le site est à couper le souffle avec vue sur l'Océan des deux côtés de l'île. Mais c'est la bâtisse elle-même, que l'on atteint après avoir grimpé un chemin de croix à flanc de montagne, qui éblouit par ses proportions, son agencement, et son esthétique. Car le père Jérôme, pasteur protestant converti au catholicisme, était aussi un grand architecte, qui a construit ou restauré des dizaines d'églises aux Bahamas, les plus connues à Long Island, dans un style éclectique, fusion du roman, du celtique, et du cycladique. Une vie extraordinaire: bourlingueur des mers, coureur des bois au Canada, prêtre itinérant dans l'arrière pays en Australie, architecte aux Bahamas, John Hawes était un Anglais issu d'une famille aisée, qui a choisi, plutôt que le confort bourgeois, à la fois l'aventure et le dénuement, inspiré par Saint François d'Assise...
Cat Island, la cinquième des Bahamas en superficie, et la terre natale de Sydney Poitier, est peut-être la plus authentique des îles que nous ayions visitées. Ici, peu ou prou de développement immobilier, des petits villages à moitié abandonnés, des kilomètres et des kilomètres où il n'y a pas âme qui vive, des plages à couper le souffle, et un rythme de vie encore plus alangui qu'ailleurs. Les locaux avec qui nous avons conversé ont semblé surpris que nous aimions leur île, où il ne se passe rien. Pourtant, au XIX eme siècle, Cat Island était prospère, exportant sisal, ananas, et coton vers l'Europe; un chemin de fer a même été construit, le seul des Bahamas, dont des vestiges subsistent. Mais toute cette activité s'est estompée, et on ne voit plus maintenant que les ruines éparpillées dans le 'bush' des minuscules maisonnettes d'esclaves des domaines agricoles. Cat Island se meurt, et les jeunes quittent pour Nassau ou les États-Unis, comme c'est le cas pour plusieurs des 'Far Islands' des Bahamas, malgré les promesses jamais tenues des politiciens et bureaucrates de favoriser le développement économique de l'île. Mais les résidents de l'île veulent-ils vraiment que leur paradis devienne un autre Paradise Island?